PROBLEMES DE LIVRAISON : QUELS SONT MES DROITS, LES RECOURS POSSIBLES ?

L’étape de la livraison est incontournable pour tous les achats faits à distance. Elle l’est aussi pour les achats faits en magasin, lorsque la marchandise n’est pas disponible immédiatement ou lorsqu’elle est trop encombrante pour que le consommateur puisse l’emporter du magasin.

 Est-ce obligatoire pour le professionnel de communiquer une date ou un délai de livraison ?

OUI

Dès qu’un achat s’accompagne d’une livraison, le professionnel est obligé de communiquer de manière claire et lisible au consommateur, avant la signature du contrat, la date ou le délai auquel il s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service (article L. 111-1, 3° du code de la consommation).

SI le contrat comporte la fourniture et l’installation d’un matériel, le vendeur doit indiquer un délai individuel pour chacune des prestations : la livraison et l’installation. Il ne peut pas indiquer un délai global (Cass.Civ 1, 20 décembre 2023, pourvoi n° 22-13014).

Cette obligation s’applique que la vente ait lieu dans un magasin ou soit conclue à distance (par internet, par correspondance, par téléphone…).

Le vendeur peut-il indiquer une date ou un délai de livraison imprécis ?

NON

Les clauses indiquant une livraison “dès que possible”, “selon les disponibilités d’approvisionnement du fabricant”, ou pour une “date donnée à titre indicatif”  sont présumées abusives. La jurisprudence est hostile à ce type de clause, estimant qu’elle confère un avantage excessif au professionnel en le laissant libre de déterminer unilatéralement la date de livraison. Il appartient au professionnel d’apporter la preuve contraire (article R. 212-2 du code de la consommation).

Si le vendeur ne respecte pas la date de livraison, quels sont les recours ?

1 – Vous pouvez suspendre le paiement de tout ou partie de ce qui reste à payer

Si le vendeur ne respecte pas la date de livraison prévue dans le contrat, ou en l’absence de date précise, si le vendeur n’a pas livré le bien ou fourni le service sans retard injustifié dans les 30 jours après la conclusion du contrat, vous pouvez lui notifier que vous suspendez le paiement de tout ou partie de ce qui reste à payer, tant que la livraison n’a pas eu lieu (article L. 216-6-I, 1° du code de la consommation).

Le code de la consommation n’exige pas que la notification soit faite par LRAR. Par précaution, conservez soigneusement une copie de votre notification avec la preuve qu’elle a été reçue par le vendeur (lettre suivie, mail avec accusé de réception, LRAR…).

> Voir la lettre-type de l’INC “Vous demandez à suspendre le paiement de votre commande car vous n’avez toujours pas été livré”

2 – Vous pouvez obtenir la résolution du contrat après une mise en demeure adressée au vendeur

Le vendeur professionnel doit vous livrer le bien ou vous fournir le service à la date ou dans le délai qu’il vous a indiqués dans le contrat, ou à défaut sans retard injustifié et au plus tard dans les 30 jours après la conclusion du contrat.

Vous n’êtes pas obligé d’accepter un report de la date de livraison, si cela ne vous convient pas. Si le délai de livraison est dépassé, et que vous n’avez pas confiance dans les arguments du vendeur repoussant sans cesse la date de livraison, vous pouvez obtenir la résolution du contrat. Vous devez au préalable mettre en demeure le vendeur d’effectuer la livraison ou de fournir le service dans un délai supplémentaire raisonnable que vous lui fixerez. Si le vendeur ne s’est pas exécuté à l’issue de ce délai, vous pouvez envoyer un courrier au vendeur l’informant que le contrat sera considéré comme résolu à la réception de cette lettre ou de votre écrit à moins qu’il ne s’exécute entre temps (article L. 216-6-I, 2° du code de la consommation).

> Voir la lettre-type de l’INC “La date de livraison prévue sur le bon de commande n’a pas été respectée. Vous adressez une mise en demeure“.

3 – Si la date de livraison est essentielle, vous pouvez résoudre immédiatement le contrat, sans passer par une mise en demeure préalable

Si la date de livraison constitue une “condition essentielle” car elle doit impérativement avoir lieu avant une certaine date ou un évènement précis, la loi vous permet de demander la résolution  immédiate du contrat dés que la date de livraison n’est pas respectée. Vous n’êtes pas obligé d’envoyer au prélalable, une lettre de mise en demeure. Dans la mesure du possible, assurez-vous que le commerçant a bien pris connaissance de cette exigence, notamment par lettre recommandée. Vous éviterez ainsi toute contestation ultérieure.

Par exemple : une robe de mariée, un équipement pour un voyage…des cadeaux destinés à être offerts pour un anniversaire…

> Voir la lettre-type de l’INC “La date de livraison prévue sur le bon de commande n’a pas été respecté. Or vous aviez informé le vendeur que cette date était impérative pour vous”.

A quel moment doit-on être informé du prix de la livraison ?

Le professionnel doit vous indiquer par écrit lors de votre achat, s’il y a lieu, le coût de la livraison. Si le professionnel ne vous a pas indiqué les frais de livraison ou les frais de mise en service au moment de votre achat, et qu’il vous en informe après votre achat, il encourt une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale (article L. 241-8 du code de la consommation).

 Si la date de livraison n’est pas respectée, peut-on demander des dommages et intérêts ?

OUI

Si le retard de livraison vous a causé un préjudice que vous êtes en mesure de chiffrer, vous pouvez demander des dommages et intérêts (article L. 216-6-II du code de la consommation). Conservez soigneusement les justificatifs des frais occasionnés par le retard de livraison, ainsi que tous vos échanges avec le vendeur.

En cas d’annulation de la commande, que deviennent les arrhes ou les acomptes versés ?

Lorsque le contrat est résolu, la somme versée au moment de la commande doit vous être remboursée. Selon la qualification donnée à cette somme, le sort du contrat et de la somme versée au moment de la commande seront différents.

Si la somme est qualifiée d’acompte dans le bon de commande, le contrat est définitif et le vendeur doit vous rembourser la somme intégralement. Il pourrait le cas échéant, être condamné à vous verser des dommages et intérêts si le non-respect de ses engagements vous a causé un préjudice que vous pouvez évaluer et prouver.

Si cette somme est qualifiée d’arrhes, cela signifie que chacune des parties peut revenir sur son engagement, l’acheteur en perdant cette somme et le vendeur en la restituant au double (article 1590 du code civil). Si rien n’est mentionné dans le contrat, on considère qu’il s’agit d’arrhes (article L. 214-1 du code de la consommation).

Que faire si la date de livraison est respectée mais la marchandise livrée est endommagée ?

1ère situation : le vendeur se charge de la livraison avec ses propres camions ou avec le transporteur de son choix :

Le vendeur est responsable de plein droit de la bonne exécution du contrat, que cette exécution soit assurée par le vendeur lui-même, ou par un prestataire extérieur (comme un transporteur par exemple). Peu importe que les dommages aient été causés au cours du transport.

Si la marchandise est endommagée ou n’est pas livrée, le vendeur doit vous faire parvenir de nouveau la marchandise à ses frais ou bien vous rembourser. A charge pour lui de se charger du recours contre le transporteur.

2ème situation : le consommateur fait appel au transporteur de son choix :

Dès que la marchandise est remise au transporteur choisi par le consommateur, ce dernier en devient juridiquement le propriétaire et à ce titre doit se charger de faire le recours contre le transporteur en cas de dommage (article L. 216-3 du code de la consommation).

Si vous constatez que la marchandise est endommagée, faites des réserves sur le bon de livraison, et confirmez-les dans les 3 jours, au transporteur par lettre recommandée. En effet, le code de commerce édicte que le transporteur est présumé responsable des dommages subis pendant le transport ainsi que de la perte, sauf cas de force majeure (article L. 133-3 du code de commerce).

SI le transporteur ne vous a pas laissé la possibilité de vérifier l’état du colis, vous avez alors 10 jours pour l’informer, par lettre recommandée, des défauts constatés (article L. 224-65 du code de la consommation).

Si vous ne respectez pas cette formalité (envoi d’une lettre recommandée dans les 3 ou 10 jours selon les cas), l’action contre le transporteur est juridiquement forclose (cela signifie qu’il n’est plus possible de demander au transporteur réparation du préjudice, y compris devant les tribunaux). Ceci est la règle juridique que le transporteur est en droit d’appliquer, si aucun geste commercial n’est accordé (article L. 133-3 du code de commerce).

Attention : Si le transporteur ne conteste pas les réserves apportées en sa présence sur le bon de livraison par le destinataire, il est alors réputé les accepter tacitement (Cass.com, 24 novembre 1987, pourvoi n° 86-14.424).

Dans tous les cas : A titre de preuve, portez vos réserves sur le bon de livraison et informez également le transporteur des défauts constatés au moment de la livraison. Les frais de retour de la marchandise endommagée et les frais d’envoi d’une nouvelle marchandise ne doivent pas rester à votre charge. Si vous en avez fait l’avance, ils doivent vous être remboursés.

Pour s’exonérer de tout ou partie de sa responsabilité, le vendeur doit prouver que l’inexécution ou la mauvaise exécution du contrat est imputable au consommateur, au fait imprévisible et insurmontable d’un tiers ou à un cas de force majeure (article L. 221-15 du code de la consommation). Cette notion est appréciée de façon restrictive par les tribunaux. Ainsi, une grève des services de La Poste n’est pas un évènement imprévisible et irrésistible dans la mesure où il existe d’autres entreprises assurant le transport de colis (TGI Bordeaux, 11 mars 2008, n°3703/2006).

Lorsque le livreur se présentera chez vous, il vous demandera de signer le bon de livraison. Ne prenez pas cette étape à la légère, car en signant le bon de livraison, vous devenez le propriétaire de la marchandise avec toutes les conséquences juridiques que cela entraîne. C’est une formalité très importante et souvent le livreur n’a pas le temps de vous laisser déballer la marchandise. Soyez attentif néanmoins sur l’état général du colis et de l’emballage pour vérifier que le colis n’a pas reçu de chocs. Si c’est le cas, mentionnez-le sur le bon de livraison.

Et si la marchandise ne correspond pas à ce que vous avez commandé ?

La marchandise doit correspondre totalement à ce que vous avez commandé (article L. 216-5 du code de la consommation).

Si la livraison comporte plusieurs éléments, elle doit être complète. Si ce n’est pas le cas, vous êtes en droit d’exiger le respect de la commande et d’invoquer la garantie légale de conformité prévue à l’article L. 217-3 du code de la consommation.

Pour en savoir plus sur les garanties dues par le vendeur, consultez la fiche de l’INC : “Les garanties du vendeur en 20 questions-réponses”.

Notre conseil : La non-conformité prévue par le code de la consommation est susceptible d’être invoquée dans des situations très variées : références différentes par rapport au bon de commande, différence esthétique, livraison incomplète,  fonctionnalités différentes, non fonctionnement de l’appareil…

Quels sont les recours en cas de problèmes de livraison ?

Les modes de résolution amiable des litiges : médiation, conciliation…

La première étape est toujours l’envoi d’un courrier recommandé au vendeur en mentionnant votre réclamation (il est essentiel d’avoir ainsi une preuve de votre réclamation ainsi qu’un accusé de réception de celle-ci par le vendeur).

Si le vendeur ne répond pas à votre courrier ou que sa réponse vous semble toujours insatisfaisante, vous pouvez recourir à la procédure de médiation de la consommation, ce qui doit être indiqué dans le contrat (bon de commande, CGV … ), (article L. 211-3 du code de la consommation).

Le vendeur doit vous communiquer les coordonnées du ou des médiateurs de la consommation compétents dont il relève (article L. 616-1 du code de la consommation), “en inscrivant ces informations de manière visible et lisible sur son site Internet, sur ses conditions générales de vente ou de service, sur ses bons de commande ou sur tout autre support adapté. Il y mentionne également l’adresse du site Internet du ou de ces médiateurs” (article R. 616-1 du code de la consommation).

Cette information doit aussi vous être fournie “dès lors qu’un litige n’a pas pu être réglé dans le cadre d’une réclamation préalable directement introduite auprès de ses services” (article L. 616-1du code de la consommation). Ainsi, il doit vous communiquer ces coordonnées dans le courrier de refus de prise en compte de votre réclamation.

Vous pouvez également saisir le conciliateur de justice. Cette démarche est gratuite, les rendez-vous se prenennt auprès de votre mairie :

https://www.conciliateurs.fr/Trouver-une-permanence 

Alertez l’administration

Pour tous les litiges relatifs à l’information sur les prix ou à une pratique commerciale trompeuse, vous pouvez alerter les agents de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF).
La plateforme Signal Conso vous permet de signaler en ligne à la DGCCRF, tout manquement à la règlementation. Vous pouvez également contacter le 0 809 540 550 (numéro d’appel non surtaxé).

Saisissez la CSF, association nationale agrée pour la défense des consommateurs

Rappel : Avant de saisir le tribunal, pour tout litige supérieur à 5 000 € vous devez tenter au préalable de régler le conflit par un mode de résolution amiable des litiges.

Si vos démarches amiables ont échoué, vous pouvez alors saisir un tribunal (renseignez-vous auprès d’une association de consommateurs, ou d’un professionnel du droit pour avoir un avis sur votre dossier).

Vous devez vous adresser au tribunal judiciaire.

Dans toutes ces étapes, la CSF peut vous accompagner, en tant qu’association nationale agrée pour la défense des consommateurs. Contactez-nous, adhérez à l’association, pour être mieux informés et défendus !

Quels documents le professionnel doit-il remettre au moment de la livraison ?

Juridiquement, la délivrance (la livraison) ou la mise en service du bien s’accompagne de la remise de la notice d’emploi et des instructions d’installation.

Si vous avez souscrit un contrat de garantie commerciale, il doit également vous être remis au moment de la livraison (article L. 216-4 du code de la consommation).

Si le professionnel ne vous remet pas ces documents à la livraison, il encourt une amende administrative dont le montant ne peut excéder 3 000 euros pour une personne physique et 15 000 euros pour une personne morale (article L. 241-8 du code de la consommation)

Par ailleurs, la loi n° 94-665 du 4 août 1994, article 2 impose que la notice d’utilisation ou le mode d’emploi des produits commercialisés en France, soit rédigée en français.

Cependant, il n’est pas précisé que les informations doivent figurer sur un support papier. Le mode d’emploi peut donc être fourni sur un support numérique, ce n’est pas contraire à l’obligation fixée par le législateur.